About

Manon Bara fait de la peinture, ce qui ne veut pas forcément dire produire des tableaux. Parce que la peinture de Manon Bara ne s’embarrasse pas trop des supports…parce qu’elle est sans limite, compulsive, gloutonne, chargée d’un désir trop grand pour se laisser contenir. La meilleure est donc celle d’aujourd’hui, qui se fait, qui déborde, encore humide, qui tâche et colle aux doigts. C’est un miel dans lequel seraient confits Jésus et Michael Jackson, quelques dinosaures, une kyrielle de petits chats. Icônes populaires compactées sans la moindre condescendance ou cruauté, cuisinées avec le respect et la dévotion qu’impliquent les pratiques cannibales.

En conséquence, l’univers de Manon Bara lui fait corps, et il est impossible de démêler l’oeuvre et l’artiste: tout y passe et d’abord elle-même. Autoportraits et textes rythment une pratique dont la fraîcheur et les outrances excitent et percutent le regard, rechargent d’excès bienvenus les (dés)enchantements expressionnistes et le rose amère du pop art.

Après la fête tient d’une accumulation dont les fondements de sable rouge et de bois de sapin forment le substrat d’un amas de déchets gorgés de cendres et de bière, de chaussures dont on a perdu les talons, de joies qui sur le coup furent sincères. C’est décati et défait, mais composté avec grâce. Couleurs, strates, matières et reliefs, ne forment pas à proprement parler une peinture…A tout le moins un véritable tableau.

BENOIT DUSART